30 juin 2020

Le temps de l'éthique, du dialogue et de la conscience retrouvée

Carmen Santana

Architecte Urbaniste


ETHIQUE

Cela fait des années que les scientifiques et les chercheurs nous avertissent sur le réchauffement climatique, sur les virus qui seront les nouvelles armes de guerre, que les hordes de réfugiés émanant précisément des guerres et du changement climatique sont de plus en plus préoccupantes, qu´il faut mettre en place une écologie digitale. Mais nous regardons tous ailleurs croyant qu´on aura le temps d´y penser plus tard… Nous vivons dans une obsolescence programmée depuis des décennies et nous nous contentons de mettre continuellement des “sparadraps”, sans une vraie pensée écosystémique.
Arrêtons de regarder ailleurs et prenons toutes et tous la responsabilité de nous retrousser les manches et d´agir.

Les hautes finances d´abord et son actionnariat, avec leur vision à court-terme, basée sur la globalisation du modèle économique, sauvage, dévastateur et déprédateur où hypocrisie et cynisme se donnent la main et laissent sur la route des millions de personnes démunies de tout droit basique et de toute justice sociale. Le néo-libéralisme de ces 30,40 dernières années.

Passons à un modèle d´économie symbiotique, qui respecte tous les écosystèmes et qui s´inspire de la nature, produit dans nos pays et sur nos territoires, qui favorise les échanges de proximité, en définitive, retrouvons une économie de proximité.

Le confinement nous a montré “la vraie vie”, celle de notre être intérieur. Le virus nous a renvoyé au cœur de nous-mêmes, loin de ce bonheur empaqueté, dicté par les dogmes de cette société d´ultra consommation.


Retrouvons nos âmes, ouvrons nos cœurs. Ce confinement nous a mis face à notre propre conscience, une conscience qui se doit d´être à la hauteur de notre intelligence ! Nous sommes tous responsables de notre propre mode de consommation.

La technocratie a démontré sa faillite, l´administration est opaque, ne rend de comptes a personne si elle n´a pas devant elle un-e dirigeant-e fort-e… créons une « Chambre de la Citoyenneté » ! Que les listes électorales soient complétées par une partie représentative de l´ensemble des citoyens et citoyennes, des femmes et des hommes non formatés au moule des Grandes Ecoles. Des gens de la rue. De “simples” habitants.

Inventons de nouveaux outils créatifs de gouvernance, agiles, pratiques, rapides, afin d´asseoir la démocratie écologique.

Nous appelons toutes nos élues et tous nos élus à travailler sur une vision lointaine qui dépasse les vicissitudes politiques, et à retrouver une culture du risque ! Oser le risque afin de mettre en place une vision systémique à long terme de Paris, de l´Europe et même mondiale.

DIALOGUER TISSER EDUQUER



 Cette crise nous a largement démontré que les citoyennes et les citoyens sont capables d´être solidaires et que nous savons nous organiser rapidement grâce aux réseaux sociaux. Chacune, chacun à son niveau.

Nous avons toutes et tous un rôle à jouer, une position à prendre. Quelle que soit notre provenance ou appartenance. Nous sommes des minuscules grains de sable mais, portés par un bon vent, nous pouvons reconfigurer les paysages !

Apprenons à nous écouter les uns les autres, sans nous interrompre, sans violence verbale, sans hausser le ton. Respectons-nous. Sachons maintenir une conversation.

Posons-nous les questions pertinentes en amont, en prenant le temps de requestionner nos modèles et retrouvons le BON SENS.

Il nous faut absolument changer de logiciel de pensée, aller vers une plasticité de l´esprit, avec humilité, bienveillance et empathie. L´intelligence collective est un bien commun, apprenons à la rendre visible.



ACUPUNTURE URBAINE

Il n´y a pas de « petit projet », tous les efforts pour déstandardiser la production de nos villes comptent et s´additionnent y compris bien entendu le travail sur le “déjà-là”, celui de la ville sur la ville, dans des processus d´acupuncture urbaine.

Plus que jamais nous devons rendre la densité aimable, nous devons apprendre à mettre en place une densité non ressentie, afin de préserver nos espaces naturels et agricoles et mettre en symbiose ces deux écosystèmes, cette relation ville/campagne.

Asseoir le paysage comme une infrastructure et aller vers des villes nourricières, où l´espace public ne sera plus dédié à 80% aux voitures, des villes où il fera bon vivre et que pourront s’approprier ses habitants.

Parlons d´architecture régénérative, de bâtiments et de quartiers productifs.
Parlons de mètres carrés intelligents, hybrides et multi fonctionnels.
Revisitons les espaces communs pour en faire de vrais lieux de vie, de rencontre, d´opportunités.

Que le porte-avions vire ne serait-ce que de 15 degrés soutenus dans le temps et peu à peu mais sans faillir, continuer de gagner des degrés de latitude pour un réel changement de cap.

Nous, architectes et urbanistes devons être capables d´accompagner nos maîtres d´ouvrages, les investisseurs, nos élu-e-s, nos aménageurs, vers une déstandardisation de la production, particulièrement celle des logements. Tout projet urbain doit devenir l’occasion de bouger les curseurs, d´ouvrir les portes “des possibles” et d´amorcer ce changement de cap.

Les femmes et hommes politiques devraient exiger cette déstandardisation de la production de nos villes et doivent être capables de mettre en place des cahiers des charges ambitieux, de s´y tenir et d’exiger des résultats aux faiseurs de la Ville. Celle-ci n´est pas la Cité dont parle si bien Richard Sennett : la Ville est un pur produit financier, la Cité, elle, est le lieu de la démocratie écologique et de l´écologie sociale co-construite entre toutes et tous.


Eduquons-nous les uns, les autres et apprenons à devenir des libres penseurs, solidaires et sans peur.

Carmen Santana, Archikubik, juin 2020