◀︎  Et demain

17 juin 2020

Cité du théâtre, théâtre de la cité

Thibault Sinay

Scénographe U.D.S
La crise du Covid-19 a métamorphosé en quelques jours l’organisation de tous les lieux culturels et leurs modes de travail.

Le spectacle vivant est le lieu de tous les possibles miroir du monde qui se réinvente en permanence. Sans cesse en évolution artistique et technique, il doit répondre aux enjeux de la crise mais également aux attentes de notre société. Notre responsabilité première est de construire des imaginaires, de contribuer à la vitalité artistique et culturelle de nos territoires.

Nous sommes aujourd'hui confrontés à un terrible paradoxe : nos concitoyens n'ont jamais été autant portés sur des activités culturelles – le confinement a vu l'explosion d'achats, téléchargements et visionnages d’œuvres en tout genre et pourtant nombre de ses acteurs et des lieux sont à l'agonie. Et si la situation sanitaire semble s'améliorer, un autre défi majeur se présente à nous : rétablir la confiance du public et se réinventer.

L’aménagement culturel du territoire s’est accentué avec la décentralisation et a permis d’organiser un maillage de lieux culturels spécifiques pour produire et accueillir le spectacle vivant.
Pourtant aucune étude ne s’intéresse à la manière dont les artistes évaluent leurs outils de travail. Les programmes architecturaux ignorent généralement le lien que les artistes entretiennent avec les théâtres en tant qu’outil ainsi que leurs réflexions sur leurs configurations et leurs statuts dans la cité.

Les crises économiques et urbaines venues, la mono fonction du bâtiment théâtre dans la cité reproduit et décline un schéma, sans prendre en compte l’évolution des missions et la mixité des programmes artistiques.
La configuration des centres d’arts et théâtres se retrouve autour d’une combinaison plus ou moins identique : un théâtre de 1’500 places et une boîte noire. Ses enveloppes externes  novatrices, emblématiques dissimulent un fonctionnement interne conservateur basé sur les pratiques du XIXe siècle.

Au final, le constat est que les bâtiments spécifiques sont dotés d’outils peu adaptés aux enjeux  techniques, technologiques, environnementaux et artistiques. La construction donne souvent des bâtiments qui fonctionnent mal ou aberrant pour les artistes. D’où l’idée d’imaginer le théâtre comme une boite à outils pour les artistes et pas uniquement un espace vide, c’est à dire un bâtiment réversible apte à recevoir dès la conception différents programmes artistiques et espaces de créations et d’expérimentations.

LE THEATRE DU XXIE

Une organisation fonctionnelle pour vivre une nouvelle expérience théâtrale.

L’architecte doit travailler non seulement sur l’apparence mais aussi sur la performance et la fonctionnalité du lieu. Les modèles du dispositif théâtral européen limitent la création. Les productions théâtrales les plus passionnantes de ces 100 dernières années se sont déroulées dans des lieux qui n’étaient pas conçus pour les accueillir. Imaginer demain, c’est devoir impliquer les artistes dans le programme de création des outils de travail pour l’adapter aux différentes missions artistiques, d’éducation, de production, de diffusion, et aux enjeux technologiques et environnementaux.

Levier de développement dans la ville, créer un lieu culturel n’est pas anodin, il doit être flexible, adapté, pour accueillir du public et performant, innovant, modulable, pour les créateurs.  Il doit s’agir d’un outil polyvalent de production et de représentation adapté aux projets de plus en plus hybrides qui voient le jour.  

Thibault Sinay, Juin 2020




Taipei Performing Arts Center (TPAC) atelier OMA


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