◀︎  Et demain

6 mai 2020

2050, l'âge d'or

Jacques de Courson

“L’âge d’or du genre humain n’est point derrière nous. Il est au-devant, il est dans la perfection de l’ordre social. Nos pères ne l’ont point vu, nos enfants y arriveront un jour. C’est à nous de leur en frayer la route” Henri de Saint Simon, 1760-1825, in “Vers l’âge d’or”

« Ne regardez jamais en arrière, sinon vous risquez de tomber dans les escaliers » Rudyard Kipling,  Prix Nobel, Grande-Bretagne

« Vous n’imaginez pas ce qui vous attend » Slogan du Futuroscope

« L’apport de la science fiction réside  en ce qu’elle nous permet de nous habituer à la possibilité de l’impossible » Romain Gary

« L’important est d’avoir le début et la fin, un trajet » François Truffault, 1932-1984

Au lecteur
L’auteur de ce texte est mort depuis quelque temps. En triant ses notes, je suis tombé sur deux récits de sa plume, non publiés, écrits  avec sa femme Catherine de Courson,  l’un sur  leur passion pour la Méditerranée,  qu’ils  ont  parcourue en tout sens toute leur vie, et l’autre sur leur « Tour de la France à vélo ». Mais surtout j’ai  lu sur écran deux textes brefs :
- l’un est une biographie raisonnée de son grand père paternel, non publiée,  intitulée  «  Un officier –diplomate entre deux guerres », datée de 2019
- l’autre est une sorte de roman de science-fiction, datée de 2020, qui  imagine ce que pourrait être la France en 2050, donc dans trente années, selon une démarche savante de prospective, dont l’auteur est familier depuis cinquante ans.

Voici ce texte surprenant, qu’il a intitulé « 2050 . L’âge d’or  ».(1)

(1) Il emprunte cette expression à la tradition biblique et au titre du film de Luis Bunuel de 1930. Plus généralement, l’«âge d’or », dit le dictionnaire, est « une époque ou une contrée qui est dans l’état le plus prospère de son histoire ».


Introduction

Mézières. Samedi de Pâques 2020.
 « Confiné comme tout le monde, j’ai inventé un conte de science-fiction pour mes petits enfants, intitulé «  2050 .L’âge d’or ». Il ne s’agit pas  en l’espèce d’un exercice de prévision – l’avenir étant pour l’auteur totalement imprévisible - , mais d’un essai de prospective sur la base d’un examen attentif des « tendances lourdes », « signaux faibles » et « ruptures »  du futur,  annoncées ou probables, puisés aux meilleurs sources. J’ai voulu, par cet exercice de description fictive de notre pays dans trente ans,  prendre le risque de marquer par une coupe dans le temps, naturellement imaginaire, une « étape » vers le futur et donc, d’après truffault, un « trajet » pour notre temps. Elle se conclue par un inquiétant « Et après ? ». Mes petits enfants pourront vérifier en 2050 si j’ai eu raison ou tort en écrivant ce texte en 2020.

Cet « arrêt sur images » en 2050,  sur la base de ce que l’on sait ou devine aujourd’hui, ou croit savoir,  de ce qui va ou pourrait advenir dans trente ans, soit une génération, est surprenant. Car il est à l’inverse des thuriféraires de la « collapsologie » à la mode, comme une sorte de vision paradoxale, un cul par dessus tête par rapport à ce que nous vivons : une pandémie universelle et mortelle.  Il prétend en effet, à l’inverse de la « doxa » en vigueur  aujourd’hui , que  l’avenir est ouvert et qu’il peut même nous surprendre ... en bien. Ce tête à queue n’est pas un paradoxe, et encore moins une provocation ou un rêve. Ce n’est pas non plus un exercice de science-fiction. Il signifie seulement  que nous pourrions être dans quelques années, à l’aube d’un nouvel « âge d’or », et que nous l’ignorons. En voici l’esquisse de l’esquisse, écrite à l’heure du « confinement » absolu du Covid 19, épidémie qui terrorise nos compatriotes  au point de parler d’une « guerre », sans ennemi identifiable et mondial en deux mois !, dont personne ne connait l’issue, sauf celle  - pour chacun - de sa  propre mort. C’est une « guerre » contre un « ennemi » virtuel et inconnu.

Prudent, j’ai  gardé  ce texte dans la mémoire de l’ordinateur de l’auteur, persuadé qu’il serait mal accueilli, tellement la folie irraisonnée des « déclinistes » envahissait  les médias en 2020, tétanisés  de plus par les ravages du Coronavirus.  Chacun sait en effet que pour être entendus les porte- voix ne doivent  parler que des trains qui arrivent en retard, et jamais de ceux qui arrivent à l’heure. Or d’après l’auteur nous ne courons pas à la catastrophe, mais – peut-être bien - vers un nouvel « âge d’or »,  après la découverte d’un « vaccin » ou d’une « fin »,  comme ce fut le cas dans toutes les pandémies de l’histoire. Et pourquoi pas ! Ci-après essai de démonstration.
 Texte de l’auteur. Avril 2020


 Rappel pour les « nuls » : au début du XVIe siècle en France, à la sortie du Moyen Age, la France  amorça une nouvelle période  célèbre de son histoire dont il reste encore des traces.  Dans  ce petit pays est née ce que les historiens  appellent « La Renaissance », période faste sur tous les plans – diplomatique, militaire, artistique, scientifique et intellectuelle - ,qui éblouit le monde  connu et qui depuis a consacré la France - pour les étrangers - comme un pays « magique » qui  conquit ensuite, par rebonds successifs, une notoriété internationale qui perdure encore aujourd’hui.
J’ai pensé à cette époque faste en visitant avec K l’hiver dernier, par un temps de chien, le « musée de la Renaissance » sis à Ecouen dans le Val d’Oise, en région parisienne. Cette visite  surprenante m’a fait rêver.
J‘ai imaginé, après cette visite, l’hypothèse  pour mon pays d’un « rebonds », après le « déluge » de notre temps présent post-pandémie. Il n’y avait en ce lieu,  en dessous d’un parking approximatif et boueux, au bout des pistes de Roissy - Charles de Gaulle, un énorme château presque vide. Pas un chat ! Nous avons failli faire demi tour. Les avions hurlaient en bout de la piste de décollage  de l’aéroport, en faisant trembler les vitres du château. Une vraie vision d’horreur, comme dans  le film « Apocalypse Now » sur la charge des hélicoptères  de l’armée américaine  au Vietnam, sur une musique de Wagner !
Dans le  bâtiment, pur Renaissance, entouré d’un parc somptueux, se niche un musée remarquable qui explique avec tableaux, portraits et graphiques comment et pourquoi notre petit pays de rien du tout avait  à l’époque ébloui le monde entier à la sortie du Moyen Age  et dans tous les domaine de l’art (architecture, peinture, sculpture, musique),  de la religion, de la diplomatie  et de la science, sous François Ier, puis ses successeurs, faisant l’admiration de toute l’Europe. Cette période  de la Renaissance française ouvrit, pour notre histoire, une succession presque  sans interruption  de  périodes  glorieuses ... jusqu’à aujourd’hui : le « Grand Siècle » de Louis XIV,  la Révolution française,  l’épopée de Napoléon Bonaparte,  le Siècle des Lumières, « Les années folles », les « Trente glorieuses »...etc. Ainsi  s’est  toujours déployée l’histoire française sur la  longue durée par impulsions fortes, ruptures radicales et saisie de  nouvelles opportunités. Nous sommes au seuil de nouveaux possibles ;  nous y serons bientôt. Il faut se  préparer à une nouvelle échéance  pour notre pays non du « progrès » ou de la « croissance » ,  ou même de la simple sauvegarde de notre « bien commun », mais d’une nouvelle « renaissance » que nous commençons à imaginer.
En sortant du Musée de la Renaissance,  j’eus  la conviction qu’une nouvelle Renaissance était possible, peut-être proche .... Je ne pouvais bien sûr pas penser que notre pays allait être la proie d’une terrible épidémie  universelle quelques mois plus tard. Mais j’eus le sentimet que « quelque chose » – mais quoi ? – était possible. Puis vinrent l’affaire – bien française – des « gilets Jaunes »,  puis le « Grand débat », puis  les violences  à l’occasion la réforme des retraites ... puis les menaces d’une pandémie inconnue et mortelle.
Je vous propose – en « levant le nez du guidon » -  d’imaginer avec moi, avec votre grand mère et vos parents dans la force de l’âge , après ces « crises » à répétition,  en France et dans le monde, l’avènement prochain d’une nouvelle « renaissance », autrement dit d’un :

NOUVEL  AGE  D’OR ,  EN  2050  (VOIRE  DES  DEMAIN  ?)


Le grand artiste-ingénieur-peintre-architecte italien de ce temps-là, « confiné » à la fin de sa vie à proximité du château royal d’Amboise, nous y invite : « Qui règle sa vie sur une étoile ne dévie jamais » Leonard de Vinci (1452-1519).
Il ne s’agit plus en effet de  se proclamer  tous « indignés », « insoumis », seulement  « en marche » ou  comme jadis  « résistants » (contre qui et quoi ?),  mais de préparer « la  relève », d’aller « en avant », sans jamais  regarder en arrière !
Mon père n’avait-il pas donné le nom  de « La relève » au Chantier de Jeunesse  dont on lui avait confié le commandement en juin  1940, alors que son pays était occupé par une armée étrangère et  que lui-même  était« confiné » avec sa famille dans un petit village d’altitude en Savoie. Il y resta  pendant  plus de trois ans !

Pour mémoire, le début du XVIe  siècle fut  marquée en France, sous le règne du roi  François Ier , selon « La France dans le monde »  de Patrick Boucheron :
- par une victoire militaire déterminante - la bataille de Marignan - dont la date – 1515 – est restée dans la mémoire de tous les écoliers français. Le rêve des rois de France est désormais accompli. L’hégémonie de  notre pays sur la péninsule italienne, cœur spirituel, culturel et économique de l’Europe d’alors est totale.
- par l’édification des châteaux de la Loire, dont le plus prestigieux fut celui de Chambord, et les premiers grands travaux d’embellissement de la capitale  royale, que viendra épanouir l’édification future du château de Versailles, résidence somptueuse du roi et de la Cour.
- par  le « génie  de la langue française » qui s’imposa en France et dans le monde cultivé par  l’ordonnance royale de Villers-Cotterêts d’août 1539
- par la découverte  des « terres neuves » du  Québec par Jacques Cartier, navigateur malouin, en 1534, et  - par là  - des richesses de l’Amérique.
Dans ces mêmes années, l’Europe s’agrandit aux dimensions du monde par :
- la découverte en 1492 de l ‘Amérique par le navigateur génois  Christophe Colomb
- la conquête du Brésil en 1500 par le portugais Pedro  Alvarez  Cabral
- le tour du monde  par Magellan,  également navigateur portugais, en 1520

Ma thèse est que la France pourrait  inaugurer en 2050 ( ou  même avant),  soit dans trente années, une génération, une « Nouvelle Renaissance », débarrassée  enfin des oripeaux  de  notre « vieux pays » qui a du mal à  se moderniser, s’aimer,  est perclus de rhumatismes, d’aigreurs et de scepticisme,  et  hélas  - trop souvent -  de nostalgie, ne cessant de regarder en arrière sa « grandeur » un peu fanée. Pour mes petits enfants, qui s’impatientent déjà, cette époque sera leur « grand jeu », leur « belle époque ». Ils auront en effet à cette date, avec leurs amis,  entre 40 et 50 ans, ou un peu plus.

 A cette date je serai mort depuis longtemps, mes fils  verront approcher la fin de leur  parcours, mais mes neuf petits enfants seront  en pleine maitrise de leurs talents, à la conquête du monde de leur temps.  Ainsi furent vers 1500 les nouveaux conquérants de l’avenir, les  Christophe Colomb, Pedro Alvarez Cabral et Jacques Cartier. ; Jacques Coeur ... et le roi François Ier. Je les envie un peu, comme tous ceux qui ont imaginé des temps futurs qu’ils ne vivront pas.  Je fais en effet  partie d’une génération, née pendant une guerre infâme, qui furent trop jeunes pour participer aux « Trente Glorieuses »,  trop vieux pour « faire 68 », et n’ont connu que les avanies d’une démocratie paresseuse, traversée de quelques orages. C’est pourquoi j’ai fui au Brésil en 1971, que je croyais  naïvement le pays de l’avenir. Hélas, devenu  celui de la corruption et du désordre, il est devenu celui du populisme le plus exacerbé... et risque de ne jamais s’en remettre, comme un enfant gâté qui a cassé un jouet trop beau pour lui.

J’eus donc grand plaisir, comme tous les prospectivistes, pendant mon « confinement », à me mettre en bascule avant, à imaginer un nouvel « âge d’or » pour la France dans trente ans, à la sortie d’une pandémie mondiale. Ce  pourrait être l’œuvre de mes descendants et leurs compatriotes, à condition qu’ils en soient capables et qu’ ils en  aient l’envie, ne serait-ce que pour faire mentir nos « prophètes » actuels, vieux, fatigués et aveugles qui  proclament  que la pandémie en cours n’est que le début,  et  la préfiguration, du désastre totale ( et final ?) de l’humanité.

Enfin mon optimisme à moyen terme s’appuie sur un loi économique  maintes fois observée : après une catastrophe ( guerre, inondations,  tremblements de terre, pandémie donc...) généralement l’économie redémarre avec vigueur, car il y a tout à reconstruire et à neuf. Ce fut le cas en France (  durant les « Trente glorieuses »)  en Allemagne et au Japon après guerre, et aujourd’hui  par exemple au Vietnam et en Éthiopie. Parions  que cette « loi » - dite de la « destruction créatrice » de l’économiste austro-américain Schumpeter - sera à nouveau respectée, en France et en Europe après la pandémie. De là à croire – ou laisser  croire - que la guerre (ou la pandémie actuelle)  a du bon, il n’y a qu’un pas...

Enfin tout le monde devrait savoir qu’un conflit armé offre aux ingénieurs de l’armement des pays en conflit des opportunités  d’innovations  techniques inespérés, expérimentés en vraie grandeur. Ainsi la bombe atomique  (et l’industrie nucléaire qui en fut le  résultat)  fut créée par l’armée américaine pour  gagner la guerre du Pacifique contre les Japonais, et Internet  fut de même conçu pour les besoins de transmission de  la même armée. De même si  les chars allemands purent envahir en 40 la Belgique puis la France, c’est aussi perce qu’ils étaient plus rapides que les chars français ... etc. Alors peut-on imaginer découvrir,  pour affronter la pandémie en cours,  un  nouveau vaccin contre le « virus » et équiper notre pays d’équipes de prospective et de résilience  pour affronter les futurs catastrophes qui nous attendent ? Croisons les doigts !

Première partie : 2020.  La catastrophe annoncée.


Curieusement , pour une raison que je ne m’explique pas, les années  2020, et celles qui précédèrent immédiatement, furent – dans le monde de ceux qui écrivent ( chercheurs, auteurs, journalistes, scientifiques ), particulièrement en France - des années  de grande dépression intellectuelle. Pour ces plumes agiles, fécondes et célèbres, la quasi totalité des nouveaux titres  en librairie fut consacrée à la « catastrophe ». Cette soudaine passion française donna son nom à un genre nouveau, littéraire, médiatique et scientifique : la « collapsologie » ( néologisme dérivée du mot collapsus signifiant  « une diminution  subite de l’activité générale d’un organisme »). Traversons-nous un « trou noir » ou bien sommes-nous déjà dedans ?

 Au XVIe siècle, il y a  donc cinq siècles, Thomas More, avocat anglais et homme politique,  inventa  un nouveau genre littéraire qu’il intitula « Utopie », puis un philosophe français nommé Gaston Berger inventa, quatre siècles plus tard, une nouvelle « discipline intellectuelle » qu’il  nomma  « Prospective ». Dans les deux cas il s’agissait de « penser » - ou essayer de penser – ce qui est au delà du présent et pas de prédire la catastrophe, ce qui est de tous les temps depuis Nostradamus et consorts. Où en sommes nous en 2020 dans ces domaines ?  Pouvons- nous nous contenter de regarder en arrière ... pour nous faire  peur, et risquer ainsi de « tomber dans les escaliers » comme le dit Kipling ? Pourquoi , en 2020, le catastrophisme est-il soudainement  devenu « tendance » ? C’est pourtant le cas, auteurs et éditeurs de grand renom rivalisant  de pessimisme aigu sur notre état présent.

 Voici un relevé non exhaustif des livres – sans parler des articles  et des films, colloques et proclamations - publiés  en France dans les années 2015-2020 par ceux que l’auteur appelle les « prophètes fatigués », et âgés comme tous les « sages » ou prétendus tels, qui tissent sans vergogne et guère de justifications le plus souvent, la toile de la dite doctrine  de la « catastrophe annoncée ». La pandémie du Coronivarus de 2020 en France et dans le monde  est pour ces auteurs et leurs lecteurs la manifestation (2000 morts en France en 2 mois) de ce qu’ils promettaient : « l’écroulement » de notre monde.

 Les plus médiatiques des chercheurs d’avenir sont  aujourd’hui  en effet ceux que j’appelle les « prophètes fatigués ». Le plus souvent  ils sont  très âgés  et la plupart prédisent l’apocalypse pour bientôt. Ils sont  scientifiques, intellectuels, historiens ou journalistes, occupent les plateaux de  télévision et sont interviewés dans  tous les magazines. Les médias ont inventé un néologisme ( un concept ?) pour parler d’eux :  la « collapsologie ». Leur refrain est devenu un « classique », sans preuve d’aucune sorte, ou presque : la catastrophe est pour demain. Ils se nomment Régis Debray  (« Bilan de faillite », titre peu rassurant), Edgar Morin (« Nous avançons comme des somnambules vers la catastrophe »), Michel Onfray, auteur de « Décadence » ( sic), Alain Finkelkraut, de l’Académie française (« Le mécontemporain », titre peu réjouissant), Jacques Attali (« Vivre ou périr, mais tous ensemble », in «  L’Express »), Nicolas Baverez ( « La France qui tombe »), Marcel Gauchet, directeur du « Débat » (« Comprendre le malheur français »  titre explicite ), et les scientifiques Michel Serres ( auteur de « La petite poussette », récemment décédé),  Jean-Louis Etienne, Hubert Reeves et Joël de Rosnay, voire à sa manière plusieurs « prophètes polytechniciens » tels Pierre Calame, ancien président de la Fondation Charles Leopold Mayer, qui sonne le tocsin depuis plus d’un demi-siècle. La panique des changements climatiques – que refusent de voir les « climato sceptiques » et que des politiques traitent par le déni -  les encouragent  à persévérer dans leurs  sinistres prédictions.

. Même Jean-Claude Guillebaud,  éditeur et ancien journaliste, pourtant jadis l’auteur de livres flamboyants sur l’avenir  ( «  Le Goût de l’avenir, Seuil, 2003 et  « Une autre vie est possible . Comment retrouver l’espérance », L’Iconoclaste. 2012),  qui publie début 2020 « Sauver la beauté du monde », comme  une sorte de « Sauve qui peut » pathétique.

Dans le même élan les  « prophètes » du « retour à la terre » (comme Pierre Rabhi),  à la « nature », au « village », au « bon vieux temps»  et  au « communautarisme » proclament la fin nécessaire des villes, le refus de la création de nouveaux enfants, et même l’affirmation d’une nécessaire « décroissance ». Certains vont même jusqu’à conseiller à leurs confrères en humanité de ... ne plus faire d’enfants (sic !), de bannir la viande de leur alimentation et de se retirer « à la campagne », qui elle « ne ment pas ». La pandémie en cours les conforte dans leurs certitudes et « Le Monde » fait bon accueil sur des pages entières à ces alarmes.

Toute les médias et les « intellectuels » célèbrent à l’envie la cohérence de cette apocalypse dont la pandémie en cours est la première étape d’une crise totale, à la fois climatique, humanitaire, économique, politique et morale.

 Il y a en plus tous ceux que l’on nomme maintenant les « déclinistes » patentés,  comme Eric Zemmour (« Le suicide français ». Terrifiant !), Michel Houllebecq (« Soumission », quel titre !), Frédéric  Beigbeder,  Emmanuel Carrère et compagnie, tous  ceux qui estiment que  « tout est foutu » (« no future » disaient les beatniks américains des années 60) et que la société est menacée d’ « effondrement » ( cf l’article de Gabriel Salerno in « Futuribles »  de novembre 2018). Tous ces  « prophètes » écrivent des livres qui font des tirages énormes en « sonnant le tocsin », prédisant l’anéantissement, le « renversement » et rien de moins que la « fin du monde ».

 Est-ce  qu’après le « déluge » (nous y sommes), ou l’ « hyper-conflit » ( Jacques  Attali), l’histoire de l’humanité s’arrêtera alors  sur le mot : « Fin de l’histoire »  ( Fukuyama) ou, comme dans le premier chapitre de « La Genèse », par l’écroulement de la « Tour de Babel » après le « déluge ?  Ne peut-on, à minima,  pour répondre à cette vision du malheur à venir, que reproduire quelques « bonnes pratiques » citées dans le film de Cyril Dion et Mélanie Laurent sobrement intitulé « Demain », qui eut grand succès il y a deux ans ? Faut-il prendre au sérieux le très médiatique  Sylvain Tesson et ses émules,  qui font retour à Ulysse ou Jeanne d’Arc ?

 J’accuse ces prophètes de malheur, par ce matraquage mental, de pervertir l’opinion par la fascination des « catastrophes »  et d’aggraver le désordre en  cultivant la médiocrité d’une pensée pauvre. D’où vient donc cette soudaine passion des intellectuels français, pour la « guerre » - comme dit le président de la République -  et les « crises » ? Et pourquoi se sont-ils tus durant la crise – pour cette fois mondiale, véritable et mortelle, du Coronavirus -  d’aujourd’hui, nullement imaginaire cette fois !

Et pourtant, de multiples indicateurs indiquent aux lecteurs des magazines qu’ avant la « crise », tout allait «  bien », et  devait aller de mieux en mieux selon les « experts » :- le chômage ne cessait de baisser et d’éminents économistes affirmaient  que le « plein emploi est possible »
-  la France et en particulier Paris  était la première destination touristique mondiale, malgré les « crises » (Gilets Jaunes, manifestations,  grèves des transports,  Coronavirus ...)
- la Sécurité Sociale  était  presque  à l’équilibre
- le « moral » des ménages était au plus haut
- les investissements étrangers en France était au sommet
 - une nouvelle génération, mieux formée et entreprenante, était  impatiente ...

Bonne nouvelle : « Nostradamus » - illustre astrologue du XVIe siècle  - prédit le « retour de la paix dans le monde  en 2025 » ( source Wikipédia) et – plus sérieux -  tous les scientifiques ou presque nous assurent  que la voiture électrique est au point,  que la maitrise du climat  est possible, que  la fin du nucléaire  est pour demain ... etc.

Alors, pourquoi attendre que « le ciel nous tombe sur la tête » ? Faut-il rester « confinés », fermer les frontières en y construisant des « murs », ignorer « l’après » et croire que tout reviendra « comme avant ». Non bien sûr.

 En attendant la « reprise »,  voici le résultat d’un exercice  double : au plan national et international qu’est ce qui nous fait penser  que nous entrerons dans quelques années – après la « crise » - dans un nouvel « âge d’or » au plan national et au plan local. En prenant comme « terrain » le pays de Mézières-lez-Cléry ( 1000 habitants), commune rurale entre Orléans et Blois, où je suis « confiné » ,  quels sont les germes  d’un nouvel « âge d’or » de notre pays,  où les rois de France avaient choisi jadis  d’y construire leurs somptueuses « résidences » ?

Deuxième partie .Vers l’âge d’or : 2020-2050

Premier janvier 2050.
Un petit crachin tiède me réveille.  Tiède ? Au lendemain de la Saint Sylvestre, une température de dix degrés  était  jadis peu fréquente, me dit mon grand père. Dans  les histoires qu’il me racontait quand j’étais enfant, c’était ce jour là  le creux de l’hiver, donc neige et frimas, gelé et froidure, avec plutôt moins dix au thermomètre que plus dix.  La température est un indicateur qui ne ment pas. Elle a augmenté depuis trente ans. Je le constate et m’en réjouis, sauf  ceux qui par profession - comme les gestionnaires de stations de ski - ont besoin du froid pour exercer leur métier. Jadis les enfants se réjouissaient des batailles de boules de neige à la récré et les moniteurs de ski  d’une saison qui ne faisait que commencer. Ils ont du  changer de métier depuis longtemps.

Au kiosque, les journaux titrent tous sur « L’année  2050 sera la plus chaude du siècle » ou « La canicule pour l’été ?  ». Plus réconfortant, les gazettes  affichent sans vergogne un titre surprenant :
TOUT  VA  BIEN

Suit alors une série de  justificatifs sous la forme de données « puisées aux meilleurs sources »  pour signifier  que  tout va de mieux en mieux aujourd’hui, en tout cas  mieux qu’hier. Ainsi :  
- la France maintient  son rang de numéro 1 en Europe  en matière de croissance démographique, lente mais régulière, après la poussée récente due pour l’essentiel aux  immigrés
- le taux de chômage est  maintenant « résiduel », de l’ordre de 5 %, alors qu’il atteignait  10% dans les années 2000, et resta  élevé jusqu’en  2020
- l’inflation est maîtrisée, comme le déficit des Finances Publiques et de la Sécurité Sociale
... mais surtout :
-  la France n’est en guerre avec personne
- l’investissement dans les entreprises a repris et le moral des ménages est bon, voir excellent. Tout le monde attend la « reprise » !
- le solde migratoire est nettement positif, surtout pour les cadres (effet post-Brexit)
-la France (et particulièrement Paris) reste la première destination touristique mondiale
- le travail des femmes se répand et les équipements collectifs suivent ( crèches, halte-garderie,  ramassages scolaires, terrains et moniteurs  de sport, aides au devoir, spectacles pour les enfants, bibliothèques ...etc.)
- les grands groupes français  sont leaders dans le monde dans le luxe, le spatial , l’aéronautique, la restauration  et les « industries de bouche », mais  aussi, ce qui est moins connu, dans l’hôtellerie et la restauration, les transports terrestres, les industries culturelles, l’automobile, l’édition, la création de start-up, le BTP, l’agriculture hors-sol ... etc.
- les pratiques culturelles des Français sont au plus haut, soit à domicile soit à l’extérieur : cinéma, théâtre, exposition d’art, pratique d’un instrument de musique, chorale, atelier d’écriture et de peinture ... etc.

Dans mon canton, en 2020, je constate  que la bonne humeur  – traditionnelle dans un pays de vignes, où le chômage  n’a  toujours été que résiduel du fait de la dynamique constante de la métropole orléanaise toute proche -  reste  constante malgré les contraintes de l’épidémie, bien acceptées en général, Voici quelques  signes de cet optimisme, saisis sur le vif chez mes voisins :
- l’équilibre maintenue entre une agriculture rentable ( vigne, fruit, asperge) et une offre d’emploi constante dans les industries de pointe, issues des « décentralisations » de la région parisienne (dont les industries du luxe),  a permis  de voir l’avenir  de façon favorable, joint en plus aux débouchés du tourisme (résidences secondaires des « parisiens », fruits et vins d’excellente réputation, restaurants gastronomiques, tourisme des « châteaux de la Loire » et de la « Loire à vélo », chasseurs de l’automne, exploitation forestière de la Sologne ... etc.).
- en sus la valeur patrimoniale des bâtiments et terres agricoles du « val » a été multipliée par 10 en 50 ans
-les « papas » ont repris de leur père ou créé des entreprises petites ou moyennes : menuiserie, agriculture, vignoble, commerce, comptabilité,  ...et même une consultation d’hypnose (sic). Les « mamans » sont  - à temps partiel - coiffeuses, infirmières, professeurs des écoles, pharmaciennes  ... L’école du « bourg » a du s’étendre et partout, en greffe sur les villages, les lotissements se sont multipliés. Un indice : aucun « gilet jaune » et  lors du « grand débat » les questions furent courtoises ... Chaque maison a 2 ou 3 voitures, toutes récentes ; aucun 2 roues.

Conclusion : En 2020 comme en 2050, personne ne se plaint. Les « jeunes » sont étudiants  à l’Université d’Orléans ou en stage professionnel, souvent à l’étranger. Mariages et enterrements se succèdent. La vie locale, les distractions et  les voyages d’été sont nombreux et variés.  Le centre médical de Cléry, à côté de la pharmacie, et la supérette ne désemplissent pas. Personne ne pense à l’avenir, car il est assuré. A la « maison de retraite » il n’y a pas eu un seul décès du au Coronivarus. Les gendarmes  et le curé  de la Basilique royale de Cléry sont  presque désoeuvrés. Les années qui viennent se présentent bien, avec une nouvelle équipe de jeunes élus très motivés. Cette conjoncture optimiste n’a aucune raison de ne pas se poursuivre dans les  siècles qui viennent, bien au contraire. Deux indicateurs : trois chasses se partagent les amateurs et  plusieurs  travailleurs font la « navette » chaque jour sur Paris. Pendant le « confinement » presque tout le monde s’est mis au « travail à domicile », les enfants étant gardés par les grands parents, comme d’habitude. Comme on dit ici, confinement ou pas: « pas de souci ».

 Je me suis alors inquiété de cet conjoncture si positive, locale et nationale, contraire aux prédictions apocalyptiques brandies par les intellectuels et les médias. Sommes- nous victimes  inconscientes d’une sorte de « théorie du complot » qui aurait succédé à la vogue du « catastrophisme » des années  2000.  Vrai ou faux ?

En 2050,  pour en avoir le cœur net, j’ai fait un tour au Palais des expositions de la porte de Versailles  dans les allées du « Salon du futur ». Ce nouveau salon est un énorme succès depuis quelques années. Son slogan – un peu simpliste -  est très accrocheur : « L’avenir est à vous ». La communication de l’événement  de cette année 2050 est orientée sur l’idée qu’une « Nouvelle Renaissance » est entrain d’apparaître, voire est déjà engagée. Voici, à la demande de  nouveaux lecteurs  et auditeurs  dans  les revues, à la radio et à la télévision sur le thème du « futur », une synthèse  des slogans, films et débats organisés à l’occasion du Salon dans les différents stands.

Voici, en cette année 2050, ce que j’ai noté dans les allées du salon :

LA FRANCE  DANS LE MONDE

Trois  débats  avaient  déchiré la France entre 2015 et 2045 concernant  la place de la France dans le monde et ses relations avec ses partenaires étrangers, dont les États-Unis, la Russie, la Chine et nos voisins européens :

1 . La France proposa d’accueillir le  nouveau siège de l’ONU à Paris ( en lieu et place de l’actuelle « École Militaire », dont les activités seraient transférées  sur le site de l’École Polytechnique à Palaiseau). Paris était en compétition avec Genève, déjà siège, dans les locaux de l’ONU-Europe,  de l’ancien siège de la  Société des Nations.

2 - la France continua à être copilote avec l’Allemagne  du « noyau dur » de l’ Union Européenne, qui devint l’interlocutrice directe des deux « grands » : la Chine ( numéro 1 mondial) et les États-Unis (numéro 2 mondial). Suite  à l’étude prospective  « European Security 2030, » lancé en 2010 par l’Union Européenne ( les 27, donc sans la Grande-Bretagne), le scénario choisi, fortement appuyé par la France fut un mix des scénarios  1 « L’heure de l’Europe » et du sénario 6 « Printemps arabe 3.O ». il eut pour résultat d’étendre, pérenniser et consolider  l’ensemble intercontinental dit « Union pour la Méditerranée » ( Europe, Afrique, Proche-Orient), dont le secrétariat général est à Barcelone depuis sa création en 2008 à Paris ( 43 États). L’objectif de cette « union », considérée par la France comme stratégique pour elle –même,  est la suivante, sauf à abandonner à la Chine et à la  Russie la maîtrise de  son rôle  dans le monde : créer un nouveau hub mondial de développement à partir de la Méditerranée, mer/mère au milieu du monde de demain.

 En effet, du fait du Brexit et du retrait des États-Unis des affaires européennes et proche-orientales, joint à la dissolution de l’OTAN, la France prit en 2020 l’initiative  de faire du complexe méditerranéen le fer de lance du nouveau « nœud » ( hub)  des affaires mondiales, réclamant le  nouveau siège de l’ONU pour l’Europe.

 Depuis les années 2000, la « matrice » de la civilisation mondiale ne fut plus aux USA mais  au cœur d’une nouvelle entité composée de trois ensembles complémentaires autour de la Méditerranée, composée de l’Europe des 27, détentrice de la science, de la culture et du plus haut niveau de vie mondial, de l’Afrique, continent en émergence,  leader mondial de la plus forte croissance potentielle, et de l’Orient, où se trouve l’origine de l’homme ( Babylone), le cœur de l’histoire  de l’humanité ( Jérusalem) et  le siège des trois religions du Livre ( juives, musulmanes et chrétiennes). L’avenir du monde en 2050 n’est donc  plus  à New York ou Pékin, et pas plus à Londres ou Paris, mais... quelque part entre Beyrouth, Le Caire, Istanbul, Tunis, Rome, Marseille, Rabat et ... Barcelone, sur les bords la « mer au milieu des terres »,  creuset de  l’origine de l’humanité.

3 . La France, du fait de sa réussite économique et de son rayonnement  technique, culturel et touristique, et en raison de l’accueil à Paris de plusieurs évènements mondiaux (dont l’Exposition Universelle en 2024), retrouve  en 2050 le rayonnement  international qu’elle eut entre les deux guerres. Ainsi elle revendiqua  pour la langue française – parlée  dans  plus de la moitié de l’Afrique -  le rôle  mondial qui est le sien ( dont l’accueil à Paris de l’Unesco depuis sa création  en 1947) et  posa la candidature de Paris pour le nouveau siège de l’ONU, à l‘étroit à New York et condamné – du fait de la montée inéluctable  des eaux de l’Océan Atlantique -  de déménager.

4. L’Afrique est le nouveau « continent de l’avenir » où se précipitent depuis 20 ans les entreprises françaises en concurrence féroce avec les chinoises, mais avec quelques longueurs d’avance ( langue, religion, histoire politique, proximité, tourisme, cadres formées en France, édition et culture ...etc.)
Enfin et surtout les réformes  engagées  dès 2020 en matière universitaire, scientifique et culturelle permirent  de  favoriser cet élan  dès 2030,  connu sous le nom de la nouvelle « Renaissance française »

 POLITIQUE  FRANCAISE

La France, à l’échelle du monde, est et reste un pays modeste, mais dont l’histoire politique  mouvementée passionne depuis toujours les historiens français, mais aussi étrangers. Marcel Gauchet attribue cette solidité au « système royal » puis impérial et enfin républicain, qui aurait « tenu le coup » depuis  la Renaissance ( XVIe siècle)

En 2050 cette solidité, due à des pouvoirs concentrés dans la main du « roi » et aujourd’hui du président de la République, a traversé les siècles sans dommages, sauf marginaux. En France, plus que nulle part ailleurs (sauf dans les dictatures, qui furent de courte durée en Europe), cette unité est garantie par une constitution  qui malgré ses variantes dans le temps a toujours préservé le pouvoir absolu du « souverain », d’où découle une armature politique et administrative spécifique, presque inchangée depuis le « Grand siècle » de Louis XIV. C’est toujours le cas encore aujourd’hui.
 D’où vient cette résilience (résistance au malheur) politique ? Pour y répondre, regardons notre système politique depuis  l’étranger.

Ainsi en France, en 2050, nous avons en France  depuis longtemps un  « Ministère de l’Identité Française »,  comme  il y a dans le roman d’Orwell « 1989 » un « Ministère de la Vérité », « qui s’occupe des divertissements, de l’information, de l’éducation et des beaux-arts ». D’où vient cette obsession typiquement française pour notre « identité », au point  d’avoir créé pour la préserver et la consolider  un ministère ad hoc, qui avait été ébauché  sous la présidence  de Nicolas Sarkozy ? Louis XIV ou le général de Gaulle  avaient-ils une « police  de la pensée »,  comme les militaires brésiliens avaient un « Département de l’Ordre Politique et Social » ( DOPS) ?
Depuis  vingt ans en France, à la suite de secousses  successives  et de désordres  de plus en plus  graves (manifestations violentes,  incertitudes climatiques,  crises  économiques successives, pandémie, montée du niveau de la mer le long des côtes,  fragilité des systèmes informatiques, flux croissant d’émigrés ...etc.), nous assistons à une obsession de la sécurité et  à une demande croissante  des citoyens et des entreprises  pour que l’État organise et impose  un ensemble de règles pour que « La France reste la France ».  La création de ce nouveau « ministère de l’Identité Française » fut une réponse à une demande forte des citoyens français.
En progressant dans les travées du « Salon du futur » je suis tombé ensuite  en arrêt sur un stand intitulé « Demain la démocratie », avec un slogan, accompagné d’un index pointé vers le citoyen: « La démocratie c’est vous ». Alors  j’ai interrogé mon « compte électoral » et répondu immédiatement à la question : «  Concernant  l’énergie nucléaire que désirez vous : oui ou non ? » J’ai répondu : « Non »

Dans le même stand une hôtesse m’a demandé si j’étais candidat aux  prochaines élections et si je votais « bleu » ou « rouge ».  Il n’y avait que deux réponses possibles : « bleu » ou « rouge ». J’ai  hésité, car je pensais pouvoir en discuter lors d’une réunion, dont les dates, lieux et heures n’étaient pas affichés. Je n’ai donc pas répondu, et  j’ai donc dû  payer une amende.
Plus loin un autre stand, richement décoré, affichait : « Les cadets ». Un « gentil membre » de cette association de promotion civique sollicitait les « jeunes » qui souhaitaient s’engager pour la « promotion des élites républicaines ». Je n’ai pas bien compris ce qu’était une « élite ». J’ai donc  passé mon chemin, ne comprenant pas bien  à quoi servait  ces « élites », sûr en tout cas qu’ à priori  je n’étais pas concerné.  Mais je  n’ai pas osé jeter le  document barré de tricolore qui ventait les mérites de ces « hyper-citoyens » !

Plus loin une annonce faisait une publicité pour  les « pompiers ». Je me suis inscrit, promettant de  remplir  le formulairechez moi. Je me suis dit en effet : « Les pompiers c’est sympa et utile. Sauver des gens c’est mieux que de les arrêter ou de les mettre en prison ». J’ai demandé  ensuite au préposé  si les  pompiers étaient armés. Il m’a répondu : « Oui, bien sur ». J’ai alors pensé au nouveau maire de Mézières qui est un jeune pompier professionnel qui paraît « sûr » et sympa, « ni de droite ni de gauche, et laïc »

Enfin , en quittant le stand, une jeune femme me tendit un tract  me proposant d’être « visiteur de prison ». Elle a ajouté : « C’est gratuit. Sans examen ».  Elle m’a dit que ce n’était pas payé. J’ai  quand  même pris la pub.

Enfin, dans le même « Salon du futur », je n’ai  vu aucune pub pour les « élections », le mot et la chose ayant été supprimés depuis longtemps m’avait  prévenu mon grand père, qui fut lui « militant », mais pas « militaire » et désolé de voir diminuer chaque année la participation aux élections.. Les  soldats de l’Armée Française sont eux  depuis longtemps des « civils », recrutés sur concours  comme « mercenaires » et le « service militaire »  a été supprimé depuis  un demi-siècle.
Le dernier stand, vaste, accueillant  et très visité, est celui de la « Chambre nationale  du futur », créée il y a déjà vingt ans. Je me suis inscrit tout de suite. Un peu plus loin  le stand de la « Chambre des Députés » était fermé (pour travaux ?)
Le dernier panneau proclamait  en grosses lettres : « La France c’est vous. Que faites- vous pour elle ? »

LA FABRICATION DES « ELITES »

Les « hauts » fonctionnaires (pourquoi « hauts » ?) et les Grandes Écoles ( pourquoi « grandes » ?) sont une particularité française, que beaucoup de pays étrangers nous envient. Faut-il modifier ce « système » - coûteux – qui produit par an un millier  d’hommes et femmes d’excellence  ( des « aristocrates de l’intelligence »), qui administrent l’État, les grandes administrations  publiques et les principaux groupes industriels et financiers français ? Le problème avait été publiquement posé par le président de la République lui-même en 2019, proposant de supprimer l’École Nationale d’Administration, dont il était lui-même diplômé.

Toute « grande nation »  bouscule en effet  de temps à autre son organisation  de l’enseignement supérieur et des structures de sélection  puis de formation  des  « cadres dirigeants » (on dit  maintenant « élites ») de son pays. Puis  personne  - et naturellement pas les « élites » eux-mêmes - n’osent  toucher à cet assemblage instable  qui  forme la dite « haute » administration de l’État, des grandes entreprises et ses « Écoles » de formation. Partout dans le monde,  les universités, publiques et privées,  assurent la charge de cette formation des « élites », et la sélection se fait seulement  par le mérite, sauf pour les écoles militaires. En Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis nulle institution n’est en charge de la sélection et de la promotion des «  grands dirigeants »... sauf en France.

 Ainsi  par exemple  le roi François Ier créa le Collège de France en 1530, la Convention l’École Polytechniques  en 1794,  puis Napoléon Bonaparte  l’École des Ponts et Chaussés, puis vinrent les dites « Grandes Écoles »  dont le dernier fleuron fut la création de  l’ESSEC, née au sein de l’Institut Catholique de Paris  en 1962,  et peu avant l’École des Hautes Études en Sciences Sociales  créée en dehors ( contre ?) l’Université par quelques mandarins de l’Université de Paris .

 Tous ces établissements publics existent toujours ... et coûtent fort cher à l’État français, mais aussi à leurs étudiants et/ou à leurs parents, donc sont ultra sélectifs socialement. Mais personne, et en particulier tous  les « Anciens » de ces établissements prestigieux – et pas plus  les parents de ces étudiants privilégiés, qui ensuite s’embauchent entre eux – ne songeraient  à mettre en cause ce système de sélection des « dirigeants », dont ils font partie, depuis  leur « prépa’ » à 18 ans. A quoi bon d’ailleurs, puisque le monde entier nous envie ce mode de sélection parfaitement démocratique. Le plus souvent ces Écoles, y compris militaires, ont été à grands frais,  récemment « sortis » du Quartier Latin et implantés dans de lointaines banlieues – fort mal desservies ( X, HEC,  ESSEC, Centrale), leurs étudiants étant  ainsi contraints de passer au moins deux ans  de leur jeunesse sous le régime de l’internat, donc séparés de la communauté  humaine et universitaire de leur génération.
Dans le même temps l’Université – gratuite – formait  encore jusqu’à il y a peu d’années l’essentiel des professeurs et cadres ( les 2/3) de la nation, comme dans tous les pays du monde, celle-ci devenant par ironie une « trappe à chômeurs », au moins les premières années.

En 2050, cette antique distinction entre les «  intelligents » ( l’élite) et les « imbéciles »  ( les autres) a cessé depuis longtemps, au prix d’une guérilla sans merci des premiers, opposés à tout changement, payés le double toute leur vie, débarassés de la préoccupation du chômage éventuel, promus  automatiquementet décorés, et défendus par une  cohorte vigilante d’Anciens de « leur École ». « Pas de  souci » donc pour ce 1% des Français et leurs familles, en général très contents d’eux . Pendant la pandémie de 2020 ils se sont tous « confinés » dans leurs résidences secondaires, à l’abri comme toujours.

Entre 2025 et 2045,  le président Emmanuel Macron  avait déjà jeté l’éponge, après avoir constaté  que le « campus français » de « Paris- Saclay » était impossible à réaliser,  faute d’accord de coopération  entre l’Université et deux Grandes Écoles férocement autonomes ( HEC et l’École Polytechnique). Les gouvernements français successifs  mirent alors  en œuvre une stratégie progressive qui fut basée sur les principes suivants :
- privatisation des universités ( quand c’est possible) et des Grandes  Écoles, comme  c’est le cas aux États-Unis  (toutes ou presque, comme MIT et Harvard, fort chers) et en Angleterre (Oxford et Cambridge). Ainsi ce fut le cas pour  l’ESSEC, l’ex-École des Ponts  (devenu « du Bâtiment et des Travaux Publics ») et  l’ex-École des Mines, boulevard St Michel.
- intégration des Grandes  Écoles, là ou c’était possible, dans et par  l’Université, l’établissement d’enseignement supérieur ou le ministère concerné et localisation dans Paris  intra-muros  (exemple : École Urbaine de Sciences-Po et École d’Économie de Paris). En conséquence suppression des clases préparatoires aux Grandes Écoles.
- suppression des doublons et nouvelles créations

Ainsi fut fait, sur ordre du président de la République,  par une loi ad hoc et  mis en oeuvre par un ministre « à poigne ». En 2050  notre reporter put ainsi constater, par rapport à la situation en 2020 :
-  « suppression » ( ?) de l’ENA (amorcée en 2020 par le rapport Thiriez).
- transformation de l’École Polytechnique, maintenue sous la tutelle du ministère de la Défense, en « École Militaire »  - intégrant l’ « École de Guerre » et l’ « École des Hautes Études de la Défense Nationale » actuelles -  en charge de former les  officiers généraux et ingénieurs  spécialisés de l’Armée Française ( objet de sa création primitive  en 1794). Maintien à Palaiseau. « Pantouflage » interdit.
-  transfert de l’École Navale à Toulon ( ou Brest ?)
- privatisation de l’ex-École des Mines, devenue « École de l’industrie, de l’Énergie et de l’Environnement »,  désormais financée par les grands groupes du CAC 40 et les anciens élèves de l’École.
- installation de l’École Française de l’Économie  et des Finances ( ou de Sciences-Po ?) , couplée avec la London  School of Economics e Political Science de Londres, logée dans les anciens locaux de l’École Polytechnique,  aujourd’hui partiellement vides.
- création de l’École  Nationale de la Diplomatie Française, en lieu et place de l’ex-Ministère de la Marine, place de la Concorde, devenue à cette occasion « place de la Paix ». Cette École, qui formera  les futurs diplomates français, sur le modèle de l’Itamarati brésilienne, fera  face au Ministère des Affaires Étrangères, de l’autre côté de la Seine.  Elle pourra s’étendre sur les locaux sous-occupés de l’Automobile-Club de France et ses voisins, qui jouxtent l’hôtel Crillon et l’Ambassade des Etats-Unis.
 - suppression du Conseil Économique , Social et Environnemental, devenu ,
  dans les locaux  actuels  du Conseil,  le Commissariat et l’Assemblée du Futur.
  - « mise en extinction » de l’Ordre du Mérite et de l’Ordre des Compagnons
 de la Libération,  et suppression de la « Fête de la Victoire » du 11 novembre et du lundi de Pentecôte.

Enfin dans le même mouvement, tous les « corps » de fonctionnaires et d’inspecteurs d’État ( « nobles d’État », disait Pierre Bourdieu),  en particulier des « inspecteurs généraux », furent supprimés peu à peu, les crédits correspondants mis à la disposition du ministre pour  nommer en « mission » ( temporaire) telle ou telle personnalité compétente  de son choix, française ou étrangère ; parlementaire, professeur ou chercheur, journaliste, dirigeant d’entreprise, artiste ou écrivain...  pour lui faire rapport sur une question d’actualité ou nommés « conseillers » à la disposition  de l’État français ou d’une organisation internationale. Les Inspecteurs des Finances  restants furent par exemple mutés à la Cour des Compte ou au Conseil d’État , et ceux de la Culture mutés  en province pour renforcer les Directions Régionales des Affaires Culturelles.
... et le reste sans  (grand)  changement

 L’ ORGANISATION DU TERRITOIRE

La France est, de l’avis unanime, le pays le plus  beau, le plus harmonieux et le plus varié  au monde  par la qualité de ses paysages naturels, de son habitat et de ses villes.  Le résultat en est que la France est le numéro 1 mondial en matière de fréquentation touristique,  et du nombre de « sites » et monuments classés. Afin de conserver et valoriser cet acquis, et en sus d’une réglementation déjà existante, voici ce qui fut entrepris pour « aménager » ce territoire unique au monde  entre 2025 et 2045 :
- maintien et consolidation  des 35 000 communes – particularité française – dont on s’aperçut  lors des élections communales de 2019  et de la « crise » du Coronavirus – que cette pratique de la démocratie à la base - longtemps critiquée comme coûteuse  -  était  très cher au cœur des Français et avait de grands mérites.
- re-création d’une administration nationale spécifique, placée auprès du Premier ministre, dite « Délégation à l ‘Aménagement du Territoire » (ex-DATAR)
- confirmation et extension du réseau  national des « métropoles », dont les schémas de cohérence territoriale (SCOT) sont rendus obligatoires et  approuvés par les nouvelles Régions et  l’État. Confirmation du rôle majeur des  25« Agences d’Urbanisme et de Prospective », chargées de l’élaboration des SCOT.

- sélection progressive d’une centaine de « villes moyennes » à statut privilégié dans toute l’Europe
Il est ainsi en France, hors des circuits touristiques,  des villes peu  connues et pourtant admirables,  qui pourraient servir d’exemples  pour les maires, adjoints à l’urbanisme et directeur des services techniques, qui seraient  encouragés à y faire étape. Citons ainsi – de mémoire – Figeac (Lot), Sarlat(Dordogne), Dieulefit ( Drôme), Beaugency ( Loiret), Beaune ( Cote d’Or),  Ploumanac’h ( Côtes du Nord), Langres ( Haute-Marne), Colmar ( Haut-Rhin) ... et à l’étranger :  Urbino ( Italie), Salzbourg ( Autriche), Lorca ( Espagne), Coimbra ( Portugal)... etc.
-  extension du réseau des « parcs  nationaux » et  « parcs naturels régionaux »
- réécriture et simplification du Code de l’Urbanisme, confié pour son application à l’administration d’État des Directions Départementales des Territoires
- création d’une nouvelle forme d’urbanisation,  connue sous l’appellation de « communautés » sur le modèle des « gated communities » (communautés fermées) américaines, asiatiques et latino-américaines
- unification des statuts des « Architectes de l’État » ( actuellement formées de 5 administrations distinctes)
- destruction ou réutilisation pour d’autres usages de la plupart des bâtiments cultuels (églises et basiliques, séminaires, couvents)
-création d’un statut professionnel des « urbanistes », publics et privés, distinct de l’Ordre des architectes, et reconnus par l’État

TRANSPORT et DEPLACEMENTS

En 2050 les véhicules individuels, taxis, cars  et bus  à essence auront quasiment disparu en France, remplacés  hors autoroutes par des véhicules électriques ou fonctionnant au gaz,  sur  chemins de terre ou voies réservées, sur l’ eau ( mer, fleuves, canaux) ou aériens (hélicoptères  ou équivalent à l’énergie « propre »). Le maillage ferroviaire  est  redevenu  complet, soit à moyenne distance ( 100 à 1000 kilomètres) par TGV, soit  pour  les courtes distances  quotidiennes, relayés pour le « dernier kilomètres », le sport, les livraisons légères et le loisir par la bicyclette ( ou équivalent), présente partout, en ville et à la campagne, avec pistes cyclables et parkings homologués.
Le véhicule sans chauffeur est abandonné, comme le « taxi volant ». Par contre  un nouvel avion, sans bruit ni pollution  ni pilote, est en cours de test
Le taxi  est  « dé-municipalisé » et le marché totalement libéré .  Tout détenteur d’un véhicule peut  « faire le taxi », gratuitement ou contre paiement via un compteur embarqué, quand il le souhaite  ou peut,  via un système de réservation et de géolocalisation centralisé de son véhicule.

ENERGIE ET CLIMAT

En 2050 toutes les centrales nucléaires auront été démantelées, remplacées par des installations  non polluantes utilisant la géothermie, le vent, le soleil, les marées, le bois ...etc. Le secteur de l’industrie nucléaire  est totalement réorganisé et  le personnel comme les installations furent progressivement  recyclées pour d’autres usages.  La politique de dissuasion nucléaire est abandonnée, transformée par des accords de coopération, sous l’égide de l’ONU. 
Toutes les constructions neuves ( immeubles, maisons, équipements publics, usines, fermes ) ou sur l’initiative de son propriétaire pour les bâtiments existants,  sont autonomes – ou presque – au plan énergétique, via des panneaux solaires sur  les toits et façades, rendus obligatoires.
Les premiers avions, bus, trains  et véhicules solaires ou à piles embarquées  sont à l’état de test
Une « police (internationale) de l’air » des satellites  et fusées
est en cours  de mise en place, suite à divers incidents
Tous les ans une journée  est consacrée à la « prévention des catastrophes » par un exercice « à blanc », sous la direction des préfets et  des maires,  organisée par la Direction de la Protection  Civile,  placée auprès du Premier ministre, avec la participation de l’Armée

INNOVATIONS ET TECHNIQUES  AVANCEES

 Pour que la société  « décolle » vers un « âge d’or », par définition inconnu dans  ses prémisses, lieux, formes et acteurs, il faut – l’histoire de la Renaissance comme  de tous les « miracles » ( français, allemands et  japonais d’après guerre  et quelques pays dits en émergence comme l’Éthiopie, le Ghana ou le Vietnam d’aujourd’hui) le démontrent - des « facteurs déclenchant » qui saisissent le réel et le tirent vers le haut.
Quels pourraient être  ces évènements (hommes, techniques, investissements, « découvertes » ...) qui, à vue humaine et d’après les experts du moment, pourraient  apparaître et « dynamiter »  la société de notre temps. Mais méfions nous : le plus souvent, sauf circonstances imprévisibles, les « experts » se sont le plus souvent trompés, ont été condamnés ou sont « arrivés trop tard ». Claude Lévi-Strauss dit ainsi avec malice à Claude Eribon : « Les humains se trompent à tout coup, l’histoire le montre. On dit « de deux choses l’une, et c’est toujours la troisième qui survient ».
En vrac, voici quelques pépites de notre avenir à trente ans :
- stabiliser ( ou inverser ?) le réchauffement climatique,  dont les conséquences sur les pandémies, les catastrophes naturelles et   la hausse du niveau des mers et l’envahissement par l’eau de mer de presque toutes les villes côtières ( ex : la Floride - dont le ranch du président Trump – seront  recouverts par l’eau de mer en 2050.  Source : « Le Monde diplomatique » d’avril 2020)
- accélérer  la réalisation des voyages interplanétaires en direction de la Lune et de Mars et la fabrication d’avions silencieux et faiblement consommateurs de carburant
- inventer des déplacements  commerciaux « sur mesure »  dans l’espace à la demande,  et un service postal par drones
- diffuser l’usage du 3D dans l’industrie, l’architecture, le design, le bâtiment et les travaux publics
- construire sur les fleuves et les mers, ou dans l’espace
- généraliser l’enseignement à distance (MOOC) et le « travail » à domicile (rendu  nécessaire pour 1/2 des salariés, étudiants et élèves pendant la crise  de 2020)
- utiliser  « intelligemment » les techniques de l’intelligence artificielle, du traitement des données et des robots
- diffuser  et maitriser la 5G ( plus de 3300 milliards de chiffre d’affaires dans le monde en 2035, d’après « Papiers » no 32)
.etc...

LA CULTURE, EXCEPTION FRANCAISE

De 2025  à  2045, la Culture fut la priorité absolue du gouvernement français, y compris sur le plan budgétaire, comme ce fut le cas lors  des ministères de la Culture animés par  Jean Zay,  André Malraux et Jack Lang. Les décisions prises furent les suivantes, en sus de l’existant, en France et dans le monde ( Instituts Français, Culture France ...) :
- maintien et développement  au niveau européen de quatre manifestations exceptionnelles : Fête de la Musique et  Journée du Patrimoine, Festival de Cannes  ( cinéma) et Festival d’Avignon ( théâtre)
- création d’un Festival de la Création et du Spectacle à Amboise, à l’occasion du  cinquième centenaire de la mort de Leonard de Vinci  (1549 à Amboise), suivi d’une université d’été privée internationale sur place, devenue ensuite pérenne  tout au long de l’année avec la participation de l’Europe
- en 2050, parution d’un numéro spécial des pages littéraires du « Figaro » et du « Monde des livres »  faisant le bilan de cinquante années de création littéraire en France, avec la participation de l’Académie française
- création d’une « chaîne » des châteaux de la Loire, sous l‘égide de l’UNESCO,  avec comme « tête de pont »  pour ses bureaux  et salles de réunion le château  actuel de Mézières-lez-Cléry,  vide, acheté par la Région Centre –Val de Loire et remis à neuf, proche de la nouvelle gare TGV «  Jeanne d’Arc » au sud d’Orléans
En  sus , les réseaux des « Maisons de la Culture » et des « Centres Culturels de Rencontre » furent  unifiés et placés sous la houlette des Régions.
Dans le même mouvement  tous les châteaux « inscrits » et « classés » - le réseau le plus  abondant de palais et châteaux de tous les pays d’Europe -,  et quel qu’en soient les propriétaires, publics ou privés, furent  contraints par une loi  de l’État d’entreprendre leur ravalement et de faciliter leur accès au public.
Tout ceci fut  annoncé  au cours d’une fête  mondiale dite du «  Printemps de la  Renaissance », tenue lors du week-end de Pentecôte 2050 au château d’Amboise, au coeur de la France et donc  de l’Europe.


Troisième partie. 2050. L’âge d’or

Aujourd’hui, le 1er janvier 2050, je me suis réveillé maussade, mais joyeux.  Il faisait doux, presque chaud, contrairement  à ce que me racontait mon grand père, qui allait à cette époque de l’année aux « sports d’hiver », activité sportive qui a totalement disparue. Il faisait doux.

Au mitan du siècle, je me suis dit, comme au 1er janvier 1500, il y a donc  quelque cinq siècles et  un peu plus, que  mon pays, la France, allait peut-être  entrer dans un nouvel « âge d’or » de son histoire. Voici pourquoi et comment, alors que je  suis mort depuis longtemps, laissant ce message d’espoir à mes petits-enfants.

Bref retour en arrière : d’après les historiens,  la France était vers 1500  prête pour l’éclosion d’une nouvelle étape de notre histoire millénaire que les historiens appellent « L’âge d’or ». Mais personne ne s’en doutait ! Connue sous le nom de « Renaissance »,  cette période  faste témoigne encore  par  de multiples chefs d’œuvre  et  des descriptions émerveillées dans nos livres d’histoire - que nos petits enfants sont priées par leurs professeurs de célébrer - que la France connut alors  autour de cette date une période faste, comme il en exista peu dans son histoire millénaire. Elle sortit du Moyen Age, période de troubles, d’injustices et de pauvreté pour le peuple de ce temps-là.
La question est : peut-il en être de même en 2050 avec le retour  d’une nouvelle espérance ? Ma réponse est oui.  C’est possible. Voici pourquoi.

Bref retour sur la  France, vers 1500 :
- la France était un royaume de grand renom, craint et respecté, l’un des plus riches, enviés et cultivés du monde connu. C’est du moins ce que les historiens d’aujourd’hui nous racontent. François Ier régnait et terrorisait ses voisins. Le plus grand artiste du temps, l’italien Leonardo da Vinci  venait se mettre à la disposition du  jeune souverain français, emportant avec lui son tableau préféré,  portrait d’une femme.
- Les grandes puissances européenne, espagnoles et portugaises, puis anglaises, néerlandaises et belges, , qui  à cette époque dominaient les mers, avaient envoyés des expéditions  vers l’Occident et vers l’Orient, en contournant l’Afrique, et découvert de nouveaux continents inconnus que l’on appela l’Amérique et l ‘Asie. Les galions qui en revinrent étaient chargés d‘or, de pierreries et de rêves grandioses. Plus encore : le navigateur  portugais Magellan, contournant le continent américain par le sud, traversa  vers l’Ouest un océan  inconnu,  atteignit  les pays que nous appelons maintenant l’Extrême Orient,  faisant ainsi pour la première fois le « tour du monde ». Pour sa part la France  mettait en valeur ce qui devint le Québec, qu’avait découvert le navigateur malouin Jacques Cartier en 1534.
- Par le traité de Tordesillas ( 7 juin 1494), les puissance ibériques s’étaient  partagées  ce qui devint l’Amérique du Sud, l’Espagne à l’ouest et le Portugal à l’est , qui deviendra  plus tard le Brésil.
- Au Sud, au delà de la Méditerranée régnait la « Sublime Porte » turque ;  puis  vinrent les armées arabes, leur art et leur science, qui remontèrent jusqu’à Poitiers
-  En Afrique, guère explorée à cette époque, des  chercheurs prétendent  que des marchands normands avaient  fondé en 1364 une « colonie » sur les côtes de Guinée, dite « Le Petit Dieppe », antérieurement aux Portugais. Le dépeçage de l’Afrique par les colons et marchands européens ne s’arrêtera plus ....

 Et déjà, la « mondialisation » - comme nous disons aujourd’hui – est en marche, et la France va jouer un rôle éminent  dans  cette « dilatation » du monde, mais avec retard sur ses autres partenaires espagnols et surtout portugais, puis anglais. Ainsi Charles-André Julien statue : « La part de la France dans les découvertes maritimes est pratiquement nulle ». Mais elle va se rattraper lors des « Années folles » par la « colonisation » de la moitié de l’Afrique.
 Le coup d’envoi de la « Renaissance » de ces années là – d’après Michelet, relayé par Patrick Boucheron ( « Histoire mondiale de la France »)  -  va   passer par ... l’Italie et non par « le grand large », ce qui fut le cas  pour les pays ibériques l’Espagne et le Portugal, et plus tard par l’Angleterre, les Pays-Bas et la Belgique.   

Résumons : à la fin du XVe siècle  l’Europe s’agrandissait aux dimensions du monde, repoussant ses frontières au delà des océans. Mais  le roi de France de ce temps, Charles VIII, en 1494, « descend en Italie et rate le monde » à la tête  cependant d’une armée de  30 000 hommes ! Ainsi, toujours d’après le  professeur au Collège de France, le roi, au départ d’Amboise ( déjà !), « donne le coup d’envoi à la Renaissance » en se rendant jusqu’à  Naples. Boucheron écrit : « Le jeune roi – il a vingt quatre ans - regarde vers Jérusalem. Il est persuadé qu’il va bousculer le destin du monde et précipiter le retour du Christ sur terre »,  parachevant ainsi la conquête de l’Orient, engagée par les croisés au Moyen Age. L’événement italien de 1494, la même année que celle du traité de Tordesillas, est « immense et décisif »,  car il est l’amorce de ce qui sera plus tard appelée «  La Renaissance », française  et italienne, puis européenne,  marquant ainsi l’entrée de la France par cette nouvelle « naissance » la sortie du Moyen Age.

De plus la passion d’écrire et lire des Français cultivés encourage une nouvelle égo-littérature, marquée par la diffusion  avec grand succès des « Essais » de Montaigne (1580),  puis des écrits de René Descartes le « génie français » ( « 1633. Descartes c’est le monde », titre « Histoire mondiale de la France » de Boucheron). De ce temps de « La Renaissance » jusqu’au XXe siècle finissant, le français sera pendant quatre siècles la langue de référence des gens cultivés.
Plus de cinq siècles plus tard, enjambant notre présent de  2020, qu’est ce qui nous fait penser que la France sera en 2050 à la veille d’une nouvelle « Renaissance » aux dimensions du monde entier cette fois,  à condition que pour l’essentiel aient été mises en œuvre les réformes indiquées plus haut, et sans que soit nécessaire une  nouvelle « révolution » politique  comme il est d’usage périodiquement dans l’histoire de France( 1789,  1940,  1958, 1968 ...) 
Imaginons- nous en 2050.

- au plan international, la France est certes une puissance moyenne par rapport aux très grands pays, mais  un pays admiré, respecté et redouté. Sa puissance militaire, son histoire culturelle et son rayonnement diplomatique  ( dont la pratique du Français, devenue « langue mondiale de référence ») est  constamment renforcée. Son économie est intégrée dans les réseaux mondiaux des  plus grands groupes financiers, industriels et commerciaux. Les investissements étrangers sans cesse croissants, accélérés par le Brexit ! ( pour les grandes sociétés mondiales, la capitale de l’Europe c’est à nouveau... Paris !). Enfin et peut-être surtout le rayonnement mondial de la création culturelle et de l’intelligence française a été sans cesse renforcé. Les touristes, les artistes, les scientifiques et  les  résidants étrangers affluent. Enfin, et c’est important pour le rayonnement de la France à l’étranger, la préparation et le déroulement de l‘Exposition Universelle de Paris en 2024  aura  été l’occasion d’un rebonds, après la crise de la pandémie du Coronivarus de 2020.
- au plan national, le « pays profond » n’a guère bougé depuis trois siècles. Mais il s’est transformé, modernisé, simplifié. Les réformes  de structure réalisées ont progressivement fait leur effet. Le résultat est le suivant :
. la France est un pays riche, structuré et stable, de belle facture et de vie  bonne
. son  économie est variée et équilibrée, l’agriculture s’étant effacée au profit des services, en constante croissance depuis un siècle. L’industrie est faite de grands groupes internationalisés, de banques puissantes et d’une  grande variété de  PME, start-ups et artisans indépendants. Les « points forts » sont  les industries du luxe,  du spatial, de l’hôtellerie- restauration, de la santé et  du numérique
. son  administration publique et son système social sont de grande qualité. Ses « points forts » en ce domaine sont  une justice indépendante, un réseau  de « hauts fonctionnaires » compétents et 30 000 maires élus « sur le terrain ». Son «  point faible » est le dialogue social avec les syndicats, peu représentatifs du monde du travail

En 2050, la France « qui bouge » concerne  en particulier :
.  la France comptera 1/ » de Français « de souche », 1/ 3 de ctoyens nés hors de France et 1/3 d’étrangers
.  le travail à domicile, qui a beaucoup progressé depuis l’épidémie  de 2020, et qui deviendra la norme dans de nombreuses professions
.  la  production d’énergies non fossiles  et la fin du « tout nucléaire » comme du « tout pétrole », seront effectives, avec une flotte banalisée de « taxis électriques »
. le  développement  du e-commerce  ( et la fin des « grandes surfaces ») et la fermeture d’un grand nombre de « guichets » bancaires, postaux et  fiscaux  seront banalisées
. la fin progressive et partielle des journaux papier, des librairies, de l’édition et des livres, et de toute la « paperasserie » administrative, sera effective, en cours ou achevé
. le regroupement dans des « maisons des services publics » - en ville comme à la campagne – de tous les « guichets » des services au public , y compris de santé, de police, de fiscalité et de justice, sera en place
. la génération des jeunes Français de 40-50 ans, nés donc  après 2000 ( la génération des Y et Z), mieux formés et trilingues, habitants hors Paris, dans les « métropoles » ou à l’étranger, hyper connectés et mobiles sur toute la planète, seront aux commandes
.  le cinéma à domicile (Netflix , Canal +...etc.) aura  remplacé le « ciné en salle » et les bureaux de poste auront disparu
.  les mini-vacances  de  quelques jours auront remplacé  les « congés d’été »
... etc.

Quatrième partie. Après 2050 ?

Après « l’âge d’or », quoi de neuf ? Certes Winston Churchill, ancien Premier ministre de sa majesté britannique et Prix Nobel, disait sagement : « Il est toujours sage de regarder en avant, mais il est difficile de regarder plus loin qu’on ne peut voir ». Ne regardons donc pas  aussi loin que les anciens communistes ( la disparition  du « profit » et la victoire des « prolétaires »), les catholiques ( le « jugement dernier »), l’anglais Thomas More, l’auteur de « L’utopie » ( la suppression de la propriété privé) et  les partisans contemporains du « revenu minimum ».
Prenons le risque cependant  de « regarder  plus loin », après 2050, et non  de promettre ou espérer  le paradis sur terre -  ce qui serait aventureux -  , en  nous posant quelques questions de fond sur l’avenir, ce qui n’engage à rien  pour demain matin, mais indique les  thèmes d’une  recherche prospective pour après demain.
Les prophètes, les scientifiques, les artistes et les philosophes ont l’habitude de  s’interroger et nous interroger « plus loin qu’on ne peut voir » disait  Churchill. Essayons, puisque personne ne le fait -  les intellectuels et prophètes  d’aujourd’hui ne  prenant  guère le risque d’être « intelligents »  à long terme. Il n’est jamais inutile de se poser quelques questions essentielles, et d’essayer d’y répondre. Voici :
-  quoi de neuf sur la prospective du climat à long terme ? Sur la hausse ( ou la baisse ?) du niveau des mers ? Et les conséquences sur les villes côtières ? Sur  les « catastrophes » à venir, quelles mesures à prendre en conséquence dès maintenant ?
- la guerre ou la paix ? et ONU renforcée ou Fédération d’États souverains ?
Après plus d’un demi-siècle de paix en Europe, succédant à un siècle de guerres fratricides et des millions de morts, la paix est-elle possible, réaliste, voulue et construite par les européens, et même – si cela est imaginable -  pour le monde entier ?
Et si oui, que  pourrait  devenir  l’armée française ( ou européenne) ?
Et que pourrait devenir la force de « dissuasion nucléaire » que la France entretient à grands frais, et interdit à ses partenaires, dont l’Allemagne ?
 Et que deviendra l’OTAN ?
Et  faut-il renforcer les frontières, isoler les « nations » ou encourager les migrations ?
- démocratie ou « populisme » ?
Comment « gouverner » ?  Et quelle forme de démocratie : directe ou représentative ? Faut-il une règle de droit pour vivre en société , et un « juge » pour appliquer cette règle et « punir » ?
- l’avenir de l’homme : de l’eugénisme au trans-humanisme ?
Peut-on « augmenter » l’homme ?
- les hommes/ les femmes
Depuis des millénaires, et quasiment dans toutes les civilisations et religions , l’homme «  sexe fort » domine la femme  considérée comme  le « sexe faible ». Cette « domination » d’un sexe sur l’autre est  mise en question, combattue  par les « féministes » et depuis quelques années fait l’objet  d’une « pensée » neuve, dite du « genre », accompagnée de quelques « avancées » timides ...
Ainsi, après la « pilule pour toutes », la Procréation Médicale Assistée  (PMA) puis bientôt la Gestation Pour Autrui ( GPA),  les « maris » et la « famille » vont-ils disparaitre ? Et l’amour ?
Pourquoi les religions sont-elles misogynes,  et par exemple pourquoi presque  tous les prêtres,  les évêques, les théologiens, les martyrs et  les « saints »  sont-ils des hommes ... comme le furent Jésus et ses disciples, Mohammed, Luther et Calvin, le Dalaï Lama et tous les dieux asiatiques ?  Pourquoi les saintes sont-elles toutes vierges , prostituées ou mères ?  Et faut-il « décléricaliser » l’Église  catholique dans le monde entier ?
Il en est de même pour les imams et pour les rabbins, tous (sauf une exception célèbre) de sexe masculin ... et pour les Jésuites...
Qu’en sera-t-il après 2050 ? Un nouveau « partenariat » équilibré  entre les deux sexes, ou bien l’effacement de cette différence anthropologique sera-t-elle  réalisé ? Tous bisexués ?
- richesse/pauvreté
La question est double : les riches ont-ils besoin des pauvres – ou le contraire - et l’écart entre les riches et les pauvres va-t-il continuer à s’accroitre ? Mixité ou communautarisme ? Vers le « revenu universel » ( ou « revenu de base » dit Piketty), ou le rétablissement de l’ISF, ou même le durcissement de la fiscalité du patrimoine ?
- religion/laïcité
 Où en sera-t-on en 2050 ? Et après ? Les hommes ont-ils  besoin d’une religion, d’un seul Dieu ou de plusieurs ? Ou de rien du tout ? Que vont devenir les prêtres, religieux/religieuses, moines/moniales, les Universités catholiques, la presse confessionnelle, les bâtiments cultuels, le tourisme religieux, Dieu lui-même ... ? Faut-il croire au diable ?
- croissance/décroissance
Toujours plus de biens et de services, d’hommes et de villes ? Ou  moins de  « croissance » et plus de « frugalité », d’agriculture en ville, d’économie « circulaire » ou « verte », de « circuits courts », de sobriété , de « bio » ? Ou plus de « robots », d’ Intelligence Artificielle (IA), d’ordinateurs  surpuissants ( G5)... ?
- nature/culture.
Quel avenir pour la biodiversité, l’eau, la nature, le corps  humain lui-même ? Et les animaux ?
- hier/demain
 Faut-il  essayer de comprendre le présent - et continuer à vivre -  en regardant dans le  rétroviseur ?  Ou au contraire enseigner autant la prospective que l’histoire ?
- Terre/univers
Faut-il quitter la Terre ou à minima l’occuper plus intelligemment,  ou  bien explorer les richesses des  déserts, des forêts, des « friches » et des océans,  ou  même le sur-sol comme le sous-sol ?
Mais surtout, quelques soient les réponses qui seront apportées à ces questions dans les années qui viennent, l’histoire enseigne que les hommes, pour vivre ensemble de façon harmonieuse et féconde, ont besoin d’une « règle du jeu » et d’un « projet », qui les stimule, les encourage à aller de l’avant, à se porter aux avant postes.  Où est ce  « grand projet », aujourd’hui, pour la France, l’Europe et le monde ? Qui en conduit l’élaboration ? Personne ? Vraiment !
A défaut, partout, en tout pays, l’histoire enseigne que le désordre, la haine et la « barbarie » l’emportent  toujours , tôt ou tard.

Conclusion. Une nouvelle renaissance ?

 Le « grand projet pour la France » fut  annoncé  au cours d’une fête  dite du «  Printemps de la  Renaissance », tenue lors du week-end de Pentecôte 2050 au château d’Amboise, au coeur de la France et donc  de l’Europe. Voici la chronique de cette fête qui frappa les contemporains par son faste  enchanteur, au point qu’il marqua les esprits du temps qui la célébrèrent chaque année comme  l’illustration  la plus accomplie du «  bon goût français ».
Extrait du quotidien « La République du Centre ». Amboise . Juin 2050

De notre  envoyé spécial :
« Le petit palais Renaissance de tuf blanc et de briques roses où fut logé l’ami du roi de France Leonardo da Vinci quelques années avant sa mort est toujours là. Mais le bruit court que  pour le cinq centième anniversaire de sa mort, son locataire d’antan va revenir et qu’il faudrait festoyer royalement à cette occasion. Et non pas virtuellement ou sur écran mais concrètement. Et comme Leonardo (1452-1519) fut non seulement peintre et architecte, mais aussi ingénieur militaire et designer de fêtes royales, on réalisa sur la terrasse du château d’Amboise une immense exposition festive dans l’esprit des manifestations d’antan .

 On bâtit en hâte un cahier des charges, suivi d’un appel  d’offres international. Architectes, décorateurs, acrobates, musiciens, peintres, acteurs, constructeurs, saltimbanques et poètes de toute l’Europe – et même d’intrépides mécènes ! -  se mirent sur les rangs. Le bruit courut qu’une fête géante se préparait sur les bords du fleuve royal. Il fallait en être !

Les archives de François Ier permirent de reconstituer – sur la base des esquisses et dessins du grand Leonardo et de ses aides -  le contenu, les structures et même les techniques et musiques d’une fête de l’époque.  Ce fut un immense succès. Et comme les trois jours  du week-end de Pentecôte 2010  ne  furent pas suffisants pour apaiser l’adresse, la gourmandise, les chansons, les danses et le bonheur des convives du canton et alentour, la ville d’Amboise, après quelques  années de rodage et enquête auprès des villes de festival de grande ampleur ( Dunkerque et Rio, Salzbourg et Cannes, Avignon et Montréal), déposa auprès de l’UNESCO un dossier de reconnaissance internationale  en matière artistique et culturelle intitulé « Fêtes royales d’Amboise »

Une « équipe festive » permanente, hébergée au château, fut alors constituée. Une foule d’intérimaires de tous les métiers de l’art et du spectacle accoururent de France, puis très vite d’Italie, de Catalogne, d’Ecosse et d’Irlande, et même du Japon , du Brésil et de Mongolie. Puis, pour rendre l’événement permanent, sur des fonds privés, la ville créa une  « Université des techniques festives », centre international d’études, recherche, documentation et expérimentation des méthodes festives »

 Amboise prit alors comme devise : « Je suis le roi. Réjouissez-vous ». Ce fut le début d’une nouvelle « Renaissance » de la France. La modernité  était en marche. Elle  ne s’arrêtera plus.

Jacques de Courson, Mai 2020