Herzog & de Meuron : Transfiguration

Cours #2 Manières de construire des mondes II

Conférence du 7 février 2015 Par Richard Scoffier, architecte, philosophe, professeur des Ecoles Nationales Supérieures d'Architecture.

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Maison en pierres sèches dans une structure en béton brut, poste d’aiguillage habillé de lamelles de cuivre, immeuble de logements semblable à un buffet de bois poussé contre un mur : une imperceptible étrangeté permet d’accorder à ces constructions banales l’aura que Walter Benjamin réservait aux œuvres d’art . Comme si Jacques Herzog et Pierre de Meuron ressentaient le besoin irrépressible de transfigurer le bâtiment le plus trivial, et de faire de même pour les gestes qui s’y rapportent et finissent par s’apparenter à de véritables rituels religieux. Les habitants de l’immeuble de la rue des Suisses à Paris peuvent en témoigner, qui doivent lever les mains à angles droit et pousser leurs lourds volets de métal déployé, s’ils veulent les ouvrir ou les fermer, en imitant les personnages hiératiques de la peinture égyptienne. Il n’y a plus de maison, plus de poste d’aiguillage, plus d’immeuble de logements, plus de tour non plus … La Tour Triangle saura disparaître dans les nuages et réapparaître comme une montagne devant l’horizon. Plus qu’une construction, c’est un sol qui permettra aux Parisiens d’accomplir des pèlerinages vers des hauts plateaux d’où ils contempleront leur ville comme les habitants de Los Angeles peuvent, depuis Mulholland Drive, admirer la leur.